Deux cartables et une nouvelle école
Les bretelles du cartable glissent encore un peu sur les petites épaules lorsqu'elles traversent la cour qui conduit au grand couloir. Dans ce long couloir où se trouvent les classes de maternelle, elles ont fait leur rentrée comme des dizaines d'autres enfants la semaine dernière.
Elles étaient les seules à avoir découvert leur nouvel univers la veille de la rentrée, les seules à s'exprimer dans une langue différente et sûrement les seules à ne pas pouvoir dire à la fin de la journée:
"On rentre à la maison?"
Il n'y a pourtant pas eu une seule larme ni même l'ombre d'une hésitation lorsqu'il a fallu accrocher leurs affaires à l'endroit où est inscrit leur prénom. Elles me donnent la main jusqu'à la porte de la classe et une fois que leur petit monde est ouvert, je n'ai plus ma place à côté d'elles.
Malgré ce désordre dans notre quotidien actuellement, chaque matin se déroule sur le tapis de l'évidence. Je n'ai pas encore entendu la sonnerie du réveil tant elles ont hâte de retrouver leurs nouveaux copains. Je n'ai pas à râler pour tirer quelques mèches de cheveux ni même pour négocier la tenue prévue pour la journée. Elles sont déjà impatientes à l'idée de rester manger à la cantine...
Il y a pourtant eu cette petite question de Miss N. alors que je l'accompagnais à sa classe:
"Mais Maman, quand est-ce qu'on va rentrer en Espagne?"
Et moi, je ne sais pas toujours trouver mes mots et je m'en veux de leur imposer mes choix. J'angoisse déjà à l'idée qu'un jour elles puissent me reprocher ce que j'ai décidé sans les consulter...
Mais lorsque je les entends faire leurs premières phrases en français ou que je les vois serrer fort leurs petits bras autour du cou de leur arrière-grand-mère, je sais que je n'aurai pas de regrets. Quoi qu'il puisse arriver, j'assume la situation et tout ce qu'elle va pouvoir nous apporter.