"Être mère" par Isabel Allende
J'achète très (trop?) rarement le journal, c'est sûrement pour cette raison que lorsque j'ai l'occasion d'en lire un, je l'épluche en entier! Dernièrement je lisais notre quotidien local quand j'ai découvert ces quelques lignes d'Isabel Allende, l'auteur (entre autres) de "La maison aux esprits" que j'ai lu il y a déjà quelques mois.
Je tenais à vous faire partager ces quelques lignes que j'ai traduites (en essayant de transmettre le mieux possible le message de l'auteur) ainsi que le texte original en langue espagnole:
"Faute du hasard ou d’un faux pas, n’importe quelle femme peut devenir mère. Dieu l’a pourvue de
« l’instinct maternel » dans le but de préserver notre espèce. Si ce n’était pas pour cette raison, ce qu’elle ferait à la vue de cette minuscule créature ridée et braillarde, serait de
la mettre à la poubelle.
Mais grâce à cet « instinct maternel », elle la regarde ébahie, elle la trouve adorable et elle s’engage à s’en occuper pendant au moins 21 ans.
Être mère c’est considérer qu’il est plus honorable de moucher des nez et de changer des couches que de terminer ses études, mener une carrière exemplaire ou rester mince.
C’est d’exercer cette vocation sans repos, avec la rengaine habituelle pour qu’ils se lavent les dents, qu’ils se couchent de bonne heure, qu’ils aient de bonne notes à l’école, qu’ils ne fument pas, qu’ils n’oublient pas leur verre de lait…
C’est se soucier des rappels de vaccins, du nettoyage de leurs oreilles, de leurs devoirs, des gros mots, des petits copains et petites copines, sans se fâcher s’ils vous envoient balader ou qu’ils vous claquent la porte au nez…
C’est rester éveillée en attendant que sa fille rentre de sa soirée et quand elle arrive enfin, faire semblant d’être endormie pour ne pas l’ennuyer.
C’est trembler quand son fils apprend à monter en moto, commence à se raser, tombe amoureux, passe des examens ou qu’il se fait opérer des amygdales.
C’est pleurer lorsque nous les voyons heureux et serrer les dents lorsque nous les voyons souffrir.
C’est être nounou, maîtresse, chauffeur, cuisinière, lingère, médecin, policière, confesseur et mécanicienne,
sans percevoir aucun salaire.
C’est consacrer son amour et son temps sans attendre aucun remerciement.
C’est dire que « c’est de son âge » quand il vous envoie sur les roses.
Une mère c’est celle qui nous aime et qui prend soin de nous chaque jour de sa vie et qui pleure, émue, lorsque l’on se souvient d’elle une fois dans l’année : le jour de la Fête des Mères.
Le pire défaut que peuvent avoir les mères est qu’elles disparaissent souvent avant que l’on arrive à leur rendre une partie de ce qu’elles ont fait pour nous.
On se retrouve démuni, coupable et irrémédiablement orphelin.
Par chance, nous n’avons qu’une mère. Parce que personne ne supporterait la douleur de la perdre deux fois."
"Ser madre" por Isabel Allende:
“Por culpa del azar o de un desliz, cualquier mujer puede convertirse en madre. Dios la ha dotado a mansalva del “instinto maternal” con la
finalidad de preservar la especie. Si no fuera por eso, lo que ella haría al ver a esa criatura minúscula, arrugada y chillona,
sería arrojarla a la basura. Pero gracias al “instinto maternal” la mira embobada, la encuentra preciosa y se dispone a cuidarla gratis hasta que cumpla por lo menos 21 años.
Ser madre es considerar que es mucho más noble sonar narices y lavar pañales, que terminar los estudios, triunfar en una carrera o mantenerse delgada.
Es ejercer la vocación sin descanso, siempre con la cantaleta de que se laven los dientes, se acuesten temprano, saquen buenas notas, no fumen, tomen leche…
Es preocuparse de las vacunas, la limpieza de las orejas, los estudios, las palabrotas, los novios y las novias; sin ofenderse cuando la mandan a callar o le tiran la puerta en las narices,
porque no están en nada.
Es quedarse desvelada esperando que vuelva la hija de la fiesta y, cuando llega hacerse la dormida para no fastidiar.
Es temblar cuando el hijo aprende a manejar, anda en moto, se afeita, se enamora, presenta exámenes o le sacan las amígdalas.
Es llorar cuando ve a los niños contentos y apretar los dientes y sonreír cuando los ve sufriendo.
Es servir de niñera, maestra, chofer, cocinera, lavandera, médico, policía, confesor y mecánico, sin cobrar sueldo alguno.
Es entregar su amor y su tiempo sin esperar que se lo agradezcan.
Es decir que “son cosas de la edad” cuando la mandan al carrizo.
Madre es alguien que nos quiere y nos cuida todos los días de su vida y que llora de emoción porque uno se acuerda de ella una vez al año : el Día de la Madre.
El peor defecto que tienen las madres es que se mueren antes de que uno alcance a retribuirles parte de lo que han hecho.
Lo dejan a uno desvalido, culpable e irremisiblemente huérfano.
Por suerte hay una sola. Porque nadie aguantaría el dolor de perderla dos veces.”